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Référé conservatoire et dommages environnementaux : une interprétation stricte du danger immédiat

Public - Droit public des affaires
Environnement & qualité - Environnement
29/06/2020
Par une ordonnance rendue le 5 juin 2020, le Conseil d’État a rejeté pour défaut d’urgence environnementale ou sanitaire une demande de référé conservatoire visant à remédier à la pollution causée par une station d’épuration sur un terrain privé.
En l’espèce, les rejets d’une station d’épuration gérée par un syndicat intercommunal des eaux débouchaient à la sortie d’une canalisation sur un terrain privé, créant une zone de stagnation des eaux et le dépérissement des arbres sur une surface estimée à 2,4 hectares.
 
Saisi sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative (référé conservatoire, appelé également référé mesures utiles) d'une demande tendant à ce qu'il soit ordonné au syndicat d’adopter des mesures permettant de remédier à la pollution engendrée, le juge des référés du tribunal administratif a enjoint au syndicat de présenter dans les 3 mois un programme d'intervention pour réduire puis supprimer les dommages subis par les requérants. Contestant cette décision, le syndicat s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’État contre cette ordonnance.
 
Pour le Conseil d’État, bien que les dommages invoqués – à savoir, « l'état dégradé de l'étanchéité de la station d'épuration et l'asphyxie des terres et du milieu forestier environnant qui en résulte » – sont bien établis et les dommages subis non sérieusement contestés(1), les requérants « n'apportent toutefois aucun élément permettant d'établir un danger immédiat sur le plan sanitaire ou environnemental ». Il en résulte que « la condition d'urgence exigée par les dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative pour permettre l'intervention du juge des référés n'est pas remplie »(2).
 
Le Conseil d’État fait donc droit à la demande du syndicat et annule l’ordonnance rendue par le tribunal administratif, offrant par cette décision une interprétation restrictive du danger environnemental immédiat en matière de référé conservatoire.
 

(1) Sur l’absence de contestation sérieuse sur l'imputabilité du dommage et sur le caractère fautif de l'abstention de la personne publique, voir notamment CE, sect., 6 déc. 2019, n° 417167 et lire Responsabilité du fait des ouvrages et travaux publics : application de règles de procédure contentieuse spéciales, Actualités du droit, 18 déc. 2019
(2) Sur la condition d’urgence non remplie en l'absence de danger immédiat, voir notamment CE, 28 févr. 2019, n° 424005 ; lire Référé conservatoire et ouvrage public : pas d’injonction sans danger immédiat !, Actualités du droit, 5 mars 2019

 
Pour aller plus loin
Pour des développements détaillés sur le référé mesures utiles, voir Le Lamy Droit public des affaires 2019, nos 4796 et suivants. Plus précisément, sur l’appréciation de la condition d’urgence, voir le n° 4800.
Sur les stations d’épuration, voir également Le Lamy Environnement – L'eau.
 
À lire également : Procès environnemental : les obstacles principalement procéduraux ?, Actualités du droit, 24 oct. 2019.
Source : Actualités du droit