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Emplois permanents dans la Fonction publique : une décision protectrice pour les agents contractuels

Public - Droit public général
15/09/2020
Dans un arrêt rendu le 29 juillet, le Conseil d’État a déclaré que dans le cadre d’un mouvement collectif tendant au changement d’affectation géographique de fonctionnaires, une administration pouvait décider de ne pas ouvrir à la mobilité les postes occupés par des agents contractuels.
Le syndicat national de l’enseignement technique agricole public – Fédération syndicale unitaire (SNETAP-FSU) demandait l’annulation de dispositions d’une note de service du ministre de l’Agriculture et de l’alimentation relative aux règles et à la procédure applicables aux demandes de mutation pour la campagne annuelle de mobilité des personnels enseignants et d’éducation de l’enseignement technique agricole public.
 
Dans son arrêt (CE, 29 juill. 2020, n° 437891), le Conseil d’État déclare que le mouvement collectif n’a pas à inclure obligatoirement les emplois actuellement occupés par des agents contractuels. Il précise également que le comité technique n’a pas à être consulté sur ce type de décision de l’Administration.
 
 
Possibilité d’exclusion des emplois occupés par des agents contractuels
 
Le syndicat requérant soutenait que la note était illégale car l’Administration avait choisi de ne pas ouvrir à la mobilité les emplois occupés par des agents contractuels à durée indéterminée. Le Conseil rappelle qu’en application de l’article 3 du statut général de la Fonction publique (L. n° 83-634, 13 juill. 1983), sauf dérogation, les emplois civils permanents sont occupés par des fonctionnaires. Les dérogations sont prévues par l’article 4 de la loi du 11 janvier 1984 pour les fonctionnaires de l’État.
 
Le Conseil déclare que si le licenciement d’un agent contractuel peut être justifié par le recrutement d’un fonctionnaire, l’Administration doit chercher à reclasser l’agent. Ainsi, l’agent contractuel ne peut être licencié que si le reclassement est impossible.
 
Selon la Haute cour, il résulte de ces règles que qu’ « il appartient à l’administration, lorsqu’elle organise […] un mouvement collectif tendant à répondre aux vœux de certains agents […] de décider, en fonction de l’intérêt du service, si elle entend ou non ouvrir à la mobilité des emplois qui sont occupés par des agents contractuels recrutés en vertu d’un contrat à durée indéterminée ».
 
En effet, la décision d’ouvrir à la mobilité les emplois permanents occupés par des agents contractuels en contrat à durée indéterminée pourrait être lourde de conséquences pour l’Administration, qui devrait chercher à reclasser ces agents avant de les licencier. C’est ainsi que le Conseil d’État décide de laisser aux administrations la liberté de ne pas ouvrir au recrutement des emplois pourvus par des agents en CDI.
 
Cette décision constitue une atténuation importante du principe selon lequel les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires. En effet, le Conseil permet aux administrations non seulement de pouvoir un poste par un agent contractuel en l’absence de fonctionnaire pour occuper le poste, mais également de ne pas ouvrir ces postes à des fonctionnaires, en les réservant à des contractuels déjà en place.
 
Absence de consultation du comité technique
 
La note de service litigieuse organisait la campagne annuelle de mobilité géographique pour la rentrée scolaire de 2020 des personnels stagiaires, titulaires et contractuels affectés à des fonctions d’éducation et d’enseignement.
 
Le syndicat contestait l’absence de consultation du comité technique au sujet de la note. La Haute cour rappelle que « les comités techniques connaissent des questions relatives à l’organisation et au fonctionnement des services, des questions relatives aux effectifs, aux emplois et aux compétences, des projets de statuts particuliers ainsi que des questions prévues par un décret en Conseil d’État » (L. n° 84-16, 11 janv. 1984, art. 15). Le Conseil déclare que la note pouvait être adoptée sans consultation préalable du comité technique, dans la mesure où les dispositions contestées « se born[ai]ent à définir les modalités d’examen des demandes de mutation des personnels stagiaires, titulaires et contractuels recrutés en vertu d’un contrat à durée indéterminée » et « n’affect[ai]ent aucune règle statutaire ».
 
La loi de transformation de la Fonction publique du 6 août 2019 (art. 4) a fusionné les comités techniques et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) au profit des comités sociaux d’administration (Fonction publique d’État), d’établissement (Fonction publique hospitalière) et territoriaux (Fonction publique territoriale). Cette transformation sera opérée en 2022. Voir Le Lamy Fonction publique territoriale, n° 130-54.
Source : Actualités du droit