Retour aux articles

Répartition des pénalités de retard : les sociétés peuvent rechercher la responsabilité du mandataire fautif

Public - Droit public des affaires
18/12/2019
Dans un arrêt rendu le 2 décembre 2019, le Conseil d’État a affirmé la possibilité pour les membres d’un groupement, dans le cadre du règlement financier des parts du marché, de rechercher la responsabilité du mandataire commun en cas de faute commise dans les indications de répartition des pénalités de retard.
En l’espèce, une région avait confié à un groupement conjoint d'entreprises un lot dans le cadre d'un marché de travaux. Un litige était né entre une société membre du groupement et le maître d'ouvrage à propos du règlement du solde de sa part du marché, portant notamment sur le montant des pénalités de retard.
 
Afin de trancher le litige, le Conseil d’État a dû appliquer l’article 20.7 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) Travaux de 1976 (applicable au litige, aujourd’hui repris en substance à l’article 20.6 du CCAG Travaux 2009), ainsi que plusieurs principes jurisprudentiels ayant explicité son application.
 
En premier lieu, le Conseil rappelle que « les sociétés membres d'un groupement conjoint peuvent contester l'existence de retards imputables au groupement ainsi que le principe ou le montant des pénalités de retard qui lui sont infligées par le maître d'ouvrage, dans le cadre du règlement financier de leur part de marché » (le maître d'ouvrage étant obligé de se conformer à la répartition des pénalités indiquée par le mandataire commun, voir en ce sens CE, 17 mars 1999, n° 165595).
 
Ensuite, si elles entendent également contester la répartition ressortant du décompte général du groupement, opérée par le maître d'ouvrage conformément aux indications fournies par le mandataire commun, « il leur appartient, à défaut de trouver entre elles une résolution amiable, de présenter des conclusions dirigées contre les autres sociétés membres du groupement tendant au règlement, par le juge administratif, de la répartition finale de ces pénalités entre elles. Si le juge fait droit à leur demande, en totalité ou en partie, il en tient compte dans l'établissement du solde propre à chaque société membre » (sur la compétence du juge administratif pour connaître d'un tel appel en garantie, voir CE, 21 févr. 1986, n° 19751).
 
Enfin, la Haute juridiction apporte une nouvelle précision à ces règles préétablies en affirmant que les sociétés membres du groupement peuvent, en outre, « rechercher la responsabilité du mandataire commun si elles estiment qu'il a commis une faute pour avoir (…) communiqué au maître d'ouvrage des indications erronées, imprécises ou insuffisantes, sous réserve qu'il en soit résulté pour elles un préjudice financier ou économique ».
 
En résumé
1. Dans le cadre du règlement financier de leur part de marché, les sociétés membres d'un groupement conjoint peuvent contester l'existence de retards imputables au groupement ainsi que le principe ou le montant des pénalités de retard qui lui sont infligées par le maître d'ouvrage.
2. Elles peuvent contester la répartition des pénalités entre elles, à condition de présenter des conclusions dirigées contre les autres membres du groupement.
3. En cas de faute du mandataire commun, qui aurait communiqué au maître d'ouvrage des indications erronées, imprécises ou insuffisantes leur ayant causé un préjudice financier ou économique, ces sociétés peuvent rechercher sa responsabilité (CE, 2 déc. 2019, n° 422615).
 
Pour aller plus loin
Sur les pénalités de retard, voir Le Lamy Droit public des affaires 2019, nos 1556 et suivants et nos 2493 et suivants.
Source : Actualités du droit