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Convention conclue entre une collectivité et un éco-organisme : contrat public ou privé ?

Public - Droit public des affaires
16/07/2019
Dans une décision rendue le 1er juillet 2019, le Tribunal des conflits a jugé que les conventions conclues par les collectivités territoriales avec des éco-organismes n'étaient pas des contrats publics et relevaient donc de la compétence du juge judiciaire.
Dans cette décision était en cause une convention conclue pour la collecte des déchets ménagers de produits chimiques dangereux entre l'éco-organisme chargé de leur gestion et une collectivité chargée de la collecte et du traitement des déchets ménagers. Le problème soulevé était celui de la nature, publique ou privée, de ce contrat.
 
Créés dans le cadre de la responsabilité élargie des producteurs, les éco-organismes sont des sociétés de droit privé investies par les pouvoirs publics de la mission d'intérêt général de prise en charge de la fin de vie (collecte, tri et recyclage) des équipements qu'ils mettent sur le marché.

Mission de service public et contrat administratif
 
Si le tribunal relève tout d’abord que « l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales confie le service public de la collecte et du traitement des déchets des ménages aux communes, qui peuvent transférer à un établissement public de coopération intercommunale ou à un syndicat mixte l'ensemble de cette compétence ou la partie relative au traitement et aux opérations de transport qui s'y rapportent », il juge toutefois que la convention en cause n’a pas le caractère de contrat administratif.
 
Le Tribunal des conflits prend en compte plusieurs considérations justifiant sa décision.
 
Il retient tout d’abord que « la convention par laquelle une collectivité territoriale s'engage envers un éco-organisme collectant des déchets ménagers de produits chimiques dangereux pour le compte des producteurs, importateurs et distributeurs à collaborer à cette collecte en contrepartie d'un versement financier ne peut être regardée comme confiant à cet organisme l'exécution du service public de la collecte et du traitement des déchets ménagers ni comme le faisant participer à cette exécution ».
 
Il affirme ensuite que l'agrément d'un éco-organisme chargé par les producteurs de s'acquitter pour leur compte de leur obligation légale n'investit pas non plus cet organisme de missions de service public. Ainsi, « la convention n'a pas davantage pour objet de coordonner la mise en œuvre de missions de service public incombant respectivement à une personne publique et à une personne privée ».
 
Enfin, je juge relève l’absence de clause exorbitante du droit commun dans la convention, contrairement à ce qu’avait retenu la cour d’appel (CA Nîmes, 15 févr. 2018, n° 16/01755). Il en déduit que la convention litigieuse présente le caractère d'un contrat de droit privé et que le litige relatif à son exécution ressort dès lors de la compétence de la juridiction judiciaire.
 
Cours d’appel vs Tribunal des conflits
 
Dans cette affaire, la cour d’appel de Nîmes s’était jugée incompétente pour statuer sur le litige, puisqu’elle estimait que la convention en cause était un contrat administratif (CA Nîmes, 15 févr. 2018, n° 16/01755). C’était d’ailleurs la position que partageaient plusieurs autres juridictions judiciaires d’appel (v. par ex. : CA Rennes, 23 novembre 2018, n° 17/07641, CA Bordeaux, 29 mai 2018, n° 16/00396 ; CA Angers, 5 déc. 2017, n° 17/00151).
 
Saisie à son tour par la cour d’appel de Nîmes, la Cour de cassation avait renvoyé au Tribunal des conflits le soin de trancher la question (Cass. 1re civ., 10 avr. 2019, n° 18-16.514). Et c’est la solution précitée qu’a livré le Tribunal dans cette décision publiée au Recueil.
 
Pour plus d’informations sur les contrats publics, voir Le Lamy Droit public des affaires.
Pour plus d’informations sur les éco-organismes, voir Le Lamy Environnement – Les Déchets.
Source : Actualités du droit